Pile à lire jusqu’au ciel, année nouvelle !

Chère pousse de séquoia, je te souhaite une merveilleuse, sautillante, abracadabrante, pétillante, heureuse année 2021 – l’occasion d’un dernier bilan de lecture sur ce blog ! 

Mais avant d’évoquer ce florissant bouquet de livres qui m’a fait voyager jusqu’au 31 décembre, un petit point sur cette année d’écriture. Ce fut une année placée sous le sceau des mots avec : plusieurs rounds de corrections sur la trilogie de Nomorgames et sur la V2 de Plein-Ciel ; la concrétisation de ma collaboration avec Anouck Faure et le départ de notre roman illustré, La demeure des Mah-Haut-Rels, en recherche éditoriale ; le point final, le soir du Solstice d’hiver, d’un nouveau premier jet, Le Cri Soleil, dont vous trouverez ici la fiche fraîchement postée. Les projets d’écriture sont nombreux et ambitieux pour 2021 et j’espère que certains d’entre eux prendront la route pour rejoindre, une brasse après l’autre, la surface du monde. 

Razzia du mois d’octobre

Mais revenons à nos lectures d’automne et de début d’hiver : à l’heure du bilan, je constate que j’ai cette année beaucoup lu, pas loin de quatre-vingt livres – le moteur de la lecture ronronne donc au beau fixe et j’en suis très heureuse. Je compte bien continuer à dévorer des histoires en 2021, d’ailleurs j’ai fait des razzias pas toujours très raisonnables, mais ô combien satisfaisantes, dans la librairie indépendante de ma région – de quoi nourrir de nombreuses soirées hivernales au coin du feu ! 

Femmes qui courent avec les loups de Clarissa Pinkola Estés 

Le 31 décembre, après une lecture étalée sur deux bons mois, j’achevais cet essai époustouflant de Clarissa Pinkola Estés : Femmes qui courent avec les loups. A la fois recueil d’histoires contées, études des grands Archétypes féminins, mythe filé de la femme sauvage, cette œuvre psychanalytique, spirituelle, sociale, intemporelle, fondamentale et poétique nous invite à plonger aux tréfonds du Soi, à questionner les schémas qui jalonnent nos vies, les pièges dans lesquels nous nous empêtrons, les leçons à en tirer et les forces vives qui sont présentent en chacun-e de nous et dans les profondeurs de la conscience universelle. Une lecture coup de poing, qui questionne, absorbe, éclaire, un conte après l’autre, ces cheminements intérieurs que nous traversons.

L’analyse de contes tels que Barbe Bleue, La jeune fille sans mains ou Les chaussons rouges (et bien d’autres) est si percutante qu’on peut sortir troublé, exalté, éprouvé, enthousiasmé par cette lecture magistrale. Clarissa Pinkola Estés expose un savoir-racine à la lumière du jour, un savoir qui résonne. Profondément. J’ai apprécié ce savant mélange analytique, historique, spirituel, porté par l’art des conteurs et des conteuses auquel recourt l’autrice pour nous embarquer dans sa toile, mystique et universelle. Ce n’est pas la dernière fois que je lis Femmes qui courent avec des loups ; j’émerge de cette lecture avec des clés et la conviction qu’il y en aura bien d’autres à piocher au fil des années dans cette œuvre vibrante, vivante et sage : un immense travail de recherche, placé sous l’égide de l’écoute, de la traversée des ombres et de la puissance de la Déesse. Foncez courir avec les loups, vous n’en reviendrez pas indemne. 

Les Petites Reines de Clémentine Beauvais 

Une lecture fraîche, aiguisée, pétillante avec une narration menée sur des roulettes supersoniques ! La plume de Clémentine Beauvais est décidément inimitable. Je l’ai découverte cette année avec Brexit Romance et Songe à la douceur, et je suis impressionnée par sa manière de raconter osée, moderne, crue parfois, sensible et diablement fine : Les Petites Reines en sont l’exemple parfait. Dans cette histoire à destination des adolescents et bien plus, on parle de harcèlement scolaire, du courage d’être soi et de la force de l’amitié. Nous suivons les aventures de trois jeunes filles élues Boudins d’or, d’argent et de bronze par leurs camarades de classe. Menées par la charismatique Mireille, elles vont renverser la donne en partant pour Paris, à vélo, en vendant des boudins. Ce périple sportif sera suivi de près par les médias et nos cyclistes accueillies avec intérêt dans les villes où elles feront étape : une vraie leçon de dignité, pétrie d’humour et de piques qui visent dans le mille, avec des personnages attachants (mention spéciale pour Kader, le frère de la plus jeune des adolescentes qui les accompagne tout du long de leur aventure en fauteuil roulant). 

L’île aux mensonges de Frances Hardinge 

Également à destination des adolescents, mais dans un registre très différent, j’ai découvert l’autrice Frances Hardinge en lisant L’île aux mensonges : une lecture qui prend place dans un contexte historique ciblé (l’Angleterre victorienne) auquel s’ajoute une touche de fantastique qui frôle l’horrifique et une narration à suspens sur fond d’enquête. Faith, quatorze ans, est fille d’un pasteur, éminent naturaliste qui se retrouve en disgrâce et s’exile avec sa famille sur une île au large des côtes anglaises. A peine arrivé sur l’île, le pasteur meurt dans des conditions mystérieuses et Faith mène l’enquête, prête à tout pour comprendre ce père autoritaire qu’elle admirait autant qu’elle le craignait et auquel elle veut rendre justice. Le point de vue de Faith sur le monde qui l’entoure, ses parents, les possibles qui lui sont offerts ou interdits, est poignant ; l’évolution du personnage encore plus. On est emporté dans sa quête éperdue qui la mène au bord de l’abysse, par sa vive intelligence et les émotions, les déchirures qui la meuvent face aux questions de société, de religion et de science, et le carcan rigide du monde dans lequel elle grandit. Une très belle lecture. 

Œuvres complètes d’Emily Dickinson 

Très attirée par le peu que je connaissais de cette grande poétesse, j’ai décidé de plonger plus profondément dans son œuvre poétique grâce à cette édition bilingue anglais/français qui permet à la fois de déguster la plume d’Emily dans la langue originale (essentiel afin de percevoir la rythmique incroyablement précise de ses phrases) et en même temps de vérifier du côté de la traduction la compréhension de certains vers dont le sens parfois m’échappait. Il y a un ‘goût’ qui émane de ces poèmes courts, une justesse qui touche un je-ne-sais-quoi à la fois dramatique, somptueux et très simple. Des poèmes qui parfois se déposent, parfois transpercent et fleurissent là où il n’y a pas de mots. C’est une lecture que j’ai entamée en 2020, mais que contrairement aux autres, je suis loin de l’avoir achevée. Je picore une page après l’autre, un poème par-ci, un poème par-là et je compte bien être troublée par l’univers poétique d’Emily Dickinson tout du long de l’année 2021. 

Le Fort Intérieur, de Stella Benson, illustré par Anouck Faure 

J’étais, je l’avoue, très curieuse de découvrir ce roman de Stella Benson, illustré (superbement) par ma chère Anouck et paru aux éditions Callidor. Mention spéciale pour l’objet-livre, magnifique (papier, finitions, mise en page) – un travail éditorial hyper soigné et empreint d’une sensibilité artistique évidente. L’histoire se déroule pendant le conflit de la première guerre mondiale : Sarah Brown, jeune femme esseulée et endormie, va se rendre sur l’île Moufle où une sorcière pétulante et naïve l’accueille dans sa drôle de maison, le Fort Intérieur. Ce texte de Stella Benson est très étonnant : à la fois critique de la société contemporaine à l’autrice, mais également compatissant et poétique, on y baigne tantôt dans un bain de cocasseries absurdes, puis dans une profonde mélancolie. Les scènes s’enchainent comme des tableaux qui nous laissent en suspension dans un entre-deux hésitant ; une expérience de lecture unique avec une vision des sorcières et de la sorcellerie (baignée d’innocence) vraiment séduisante. 

La Belle Sauvage, premier tome de la Trilogie de la Poussière, de Phillip Pullman 

Une très grande joie que cette lecture-ci. J’ai replongé dans l’univers de la Croisée des mondes avec appréhension. Je craignais quelque peu cette ‘suite’ qui aurait pu me décevoir et teinter la trilogie originelle que j’avais tant aimé d’une couleur moins plaisante. Il n’en a rien été. Ce premier tome de la Trilogie de la Poussière m’a totalement embarquée (c’est le cas de le dire) sur son canoë. Dix années avant les événements de la Croisée des mondes, Malcom Polstead, onze ans, enfant généreux, intelligent et curieux vit avec ses parents aubergistes dans l’auberge de la Truite. Il va se prendre d’affection pour la petite Lyra, ce bébé accueilli dans des circonstances étranges par les religieuses qui vivent de l’autre côté du fleuve. Alors que la menace d’une inondation de grande ampleur gronde, les événements vont se précipiter, poussant le jeune Malcom à affronter des ennemis qui ne sont pas de son âge ou de son temps pour protéger l’enfant de ceux qui la convoitent. Un texte d’une narration exquise. On y retrouve le monde de Lyra, les daemons qui en sont l’indubitable apanage, et de nombreux personnages de la première trilogie. Outre l’univers génial construit par Philip Pullman, ce premier tome est porté par un personnage doux, mais déterminé, extraordinairement attachant. Je me plonge dès à présent dans le deuxième tome de la trilogie avec ferveur et je vais trépigner en attendant la sortie du troisième opus. Si vous aimez Pullman, n’hésitez pas, plongez ! 

Etés anglais, la saga des Cazalet, d’Elizabeth Jane Howard 

Parce que cet article se trouve décidément sous le signe de l’Angleterre, j’ai fait une petite excursion du côté des Cazalet : saga familiale qui se déroule dans le contexte de la seconde guerre mondiale, cette série en quatre tomes, me semble-t-il, est encore en cours de traduction en langue française. On y suit le quotidien d’une famille aisée en Angleterre sur trois générations. Ce portrait vivant, tendre mais sans concessions, fait la part belle aux enfants, aux adolescents et aux femmes de cette famille dont l’autrice croque les préoccupations avec une justesse frappante. On retrouve dans ce premier tome une ambiance à la Downtown Abbey, saupoudrée du contexte historique et de l’arrivée imminente de la guerre qui s’apprête, on le sent bien, à bouleverser les destinées des uns et des autres. Une lecture fleuve qui nous emporte facilement au cours de mille et une scénettes dont certaines, marquantes, restent longtemps à l’esprit. 

Sous la lumière d’Hélios de Dominique Lémuri 

Je terminerai cet article en vous parlant d’un roman pour lequel j’ai un attachement tout particulier car j’ai eu la chance et le plaisir de le bêta-lire de bout en bout, il y a déjà quelques années de cela. Sous la lumière d’Hélios, sorti en septembre 2020 aux éditions Armada, est un roman de Science-Fiction qui mêle intelligemment les éléments du voyage dans l’espace, la découverte d’un nouveau monde, ici une planète entière avec sa faune et sa flore, et la rencontre d’une multiplicité de cultures, de technologies, de visions et de modes de vie. On suit les aventures de Clara qui a dû quitter la Terre à la dernière minute pour s’embarquer sur un vaisseau de colons à destination d’Eltanis, une planète sur laquelle les voyageurs ont prévu de s’implanter. Mais voilà qu’en arrivant sur place, ils sont accueillis par d’autres colons, partis plus tard de la Terre, mais bénéficiant d’avancées technologiques qui leur ont permis d’arriver avant eux. La cohabitation recèle son lot de challenges. En plus de quoi, se manifestent sur Eltanis d’autres formes de vies alien, aussi fascinantes qu’inquiétantes, qui mettront chacun face à ses convictions éthiques. Suivre la très touchante (et badass !) Clara dans sa découverte d’Eltanis, c’est s’embarquer dans une aventure étourdissante au sein d’un décor fabuleux, riche de mille nuances et d’autant de questions sociales et humaines.

Mention spéciale numéro un pour la galerie de personnages secondaires très travaillés. Mention spéciale numéro deux pour le portfolio de savoureuses illustrations réalisées par le talentueux JMX intégré dans le livre papier. Mention spéciale numéro trois pour la poésie, la densité humaine et le regard brodé d’émerveillement de Dominique Lémuri sur le monde d’Eltanis et la destinée de Clara. 

Et pour ne pas perdre les bonnes habitudes, chère pousse de séquoia, huit titres sont venus enrichir ma gigantesque Pile à Lire !

★ – Morwenna, de Jo Dalton qui m’a été recommandé par un Ours Sage et féru de miel de ma connaissance 

★ – La fileuse d’argent de Naomi Novik, dont j’ai entendu parler à de nombreuses occurrences sur la toile et dans laquelle j’espère me plonger prochainement.

★ – Je suis décidément dans une période Phillip Pullman et le retour enthousiaste d’Anaïs La Porte m‘a convaincue de lire son ouvrage sur l’écriture, Daemons Voices

★ – Sur le conseil d’une amie écrivaine, je vais aussi lire Anne de Green Gables de Lucy Maud Montgomery, faisant une pierre deux coups en acquérant l’un des magnifiques ouvrages de la maison d’édition Monsieur Toussaint Louverture. 

★ – Après un épluchage minutieux du dernier catalogue de ma librairie indépendante, se sont rajoutés à ma pile à lire : Betty de Tiffany MacDaniel, Lumière d’été, puis vient la nuit de Jon Kalman Stefansson et Rassemblez-vous en mon nom de Maya Angelou 

★ – Noël m’a apporté au pied du sapin deux des publications récentes de Benjamin Lacombe dont j’adore les illustrations : La famille Appenzel et Esprits et Créatures du Japon dans lesquelles je vais me plonger avec bonheur. 

★ – Sur la chaine youtube De quoi ça parle ? j’ai été interpellée par le pitch de Li Cam sur son livre Résolution, et je le rajoute dans mes intentions de lectures à venir. 

★ – Enfin, un album jeunesse me fait de l’œil depuis un petit moment et je le dépose subrepticement dans un coin de ma liste : Le Dernier des Loups, de Sébastien Pérez et Justine Brax. 

Razzia du mois de décembre

2021 commence donc sous de joyeux auspices ! 

Très chère pousse de séquoia, je dépose sur ton chemin une fleur givrée, un parfum d’aventure et les teintes d’or hivernales dont je ne me lasse décidément pas. 

Lumière sur ta journée, 

Siècle 

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